Comment quitter son entreprise sans démissionner ?
- Maître Ariane TRAN
- 2 nov. 2023
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 5 juil.
Lorsqu’un salarié souhaite quitter son emploi, la démission est souvent le premier réflexe. Elle est simple, rapide… mais peut s’avérer pénalisante, notamment en ce qui concerne le droit aux allocations chômage. Heureusement, il existe plusieurs alternatives à la démission, selon la situation personnelle du salarié et les conditions de son départ.
Pourquoi ne pas démissionner ?
La démission est un acte unilatéral, qui ne nécessite pas l’accord de l’employeur, mais elle n’ouvre en principe pas droit à l’assurance chômage, sauf exceptions précises (démission légitime). C’est pourquoi il est essentiel de bien connaître les autres modes de rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié.
1. La rupture conventionnelle : une solution amiable et encadrée
Un accord commun entre salarié et employeur
La rupture conventionnelle permet au salarié et à l’employeur de mettre fin au contrat de travail à l’amiable, sans avoir à justifier d’un motif particulier. C’est une solution souvent choisie lorsque les deux parties souhaitent une séparation en bons termes.
Une procédure précise à respecter
Entretien(s) préalable(s)
Signature d’une convention de rupture mentionnant les conditions (date de fin, indemnité…)
Homologation obligatoire par la DDETSPP (anciennement Direccte)
Avantage : le salarié peut percevoir les allocations chômage après la rupture conventionnelle.
2. La prise d'acte de la rupture : pour manquements graves de l'employeur
Une rupture immédiate à l’initiative du salarié
La prise d’acte permet au salarié de rompre immédiatement son contrat de travail lorsqu’il reproche à son employeur des manquements suffisamment graves : harcèlement, non-paiement du salaire, modification unilatérale du contrat, etc.
Une procédure judiciaire incontournable
Le salarié notifie par écrit sa décision (lettre recommandée avec AR)
Il doit saisir le Conseil de prud’hommes
Le juge décidera si la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ou d’une simple démission
⚠️ Attention : si le juge considère que les griefs ne sont pas suffisamment graves, le salarié est réputé avoir démissionné et n’aura droit à aucune indemnité ni au chômage.
La prise d'acte de la rupture permet au salarié de rompre immédiatement, et de manière unilatérale, son contrat de travail lorsque l'employeur a commis de graves manquements à son égard.
Pour ce faire, le salarié doit adresser un courrier recommandé avec accusé de réception à l'employeur lui notifiant son départ en raison des manquements de l'employeur. Le salarié n'a pas besoin de respecter un préavis. Il doit cependant expliquer dans le même courrier les manquements qu'ils reprochent à son employeur.
Après la prise d'acte de la rupture, le salarié doit saisir le conseil de prud'hommes compétent.
S'il obtient gain de cause, la prise d'acte de la rupture sera requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse avec toutes ses conséquences : indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de préavis, dommages et intérêts ...
S'il n'obtient pas gain de cause, la prise d'acte de la rupture sera considérée comme une démission.
3. La résiliation judiciaire du contrat : continuer à travailler ... en saisissant le Conseil de prud'hommes
Le salarié qui reproche à l'employeur des manquements graves peut saisir le Conseil de prud'hommes compétent pour demander la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur.
Un maintien dans l’emploi le temps de la procédure
Contrairement à la prise d’acte, la résiliation judiciaire permet au salarié de demander la rupture du contrat de travail tout en continuant à travailler.
Le salarié saisit le Conseil de prud’hommes
Il continue à exécuter son contrat jusqu’au jugement
Résiliation judiciaire : quels effets ?
Si le juge reconnaît des manquements graves de l’employeur, la rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse
Sinon, le contrat se poursuit normalement
C’est une solution intéressante pour se protéger sans se priver de revenus.
4. L'abandon de poste : désormais considéré comme une démission
Autrefois utilisé pour provoquer un licenciement (et percevoir le chômage), l’abandon de poste est désormais assimilé à une présomption de démission, sauf justification légitime.
Ce que prévoit la loi (article L1237-1-1 du Code du travail)
L’employeur peut mettre en demeure le salarié de justifier son absence et de reprendre le travail
Si le salarié ne répond pas dans le délai imparti (minimum 15 jours calendaires), il est présumé démissionnaire
Il n’a donc pas droit aux indemnités chômage
Conclusion : l’abandon de poste n’est plus une stratégie viable pour quitter son emploi en espérant être indemnisé.
En résumé : quelle option choisir pour quitter son emploi ?
Mode de rupture | Peut ouvrir droit au chômage | Procédure judiciaire ? | Conseils |
Rupture conventionnelle | ✅ Oui | ❌ Non | Solution amiable à privilégier si possible |
Prise d’acte | ✅ Si validée par le juge | ✅ Oui | À utiliser si les manquements sont très graves |
Résiliation judiciaire | ✅ Si validée par le juge | ✅ Oui | Permet de rester en poste en attendant le jugement |
Abandon de poste | ❌ Non | ❌ Non | Déconseillé, fort risque de perte de droits |
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